Un des grands ennemis de l’Eglise de Jésus Christ est le formalisme. Qu’est-ce que le formalisme ? C’est une tendance que l’on retrouve dans nos églises de remplacer le sacré, le vrai, le réel, la vraie présence de Dieu, ainsi que les principes mêmes de la Parole, par toutes sortes de formes extérieures. L’accent est alors mis sur l’observance des rites, plutôt que sur leur signification.
Paul, en 2 Timothée 3.1-5, parle à propos des gens, dans l’Eglise, ayant l\’apparence de la piété, mais reniant ce qui en fait la force. Ensuite, il dit:
“Éloigne-toi de ces hommes-là”.
Or, ce que l’Eglise a besoin c’est d’un renouveau constant. Nous ne pouvons pas vivre avec le feu d’hier, car aujourd’hui déjà il diminue d’intensité et demain, il sera éteint. L’observance des rites : le baptême d’eau, la Sainte Cène, les agapes, la louange, la prière, le jeûne sont fondamentaux pour notre foi, mais nous devrons toujours faire attention à ce que l’observance ne se substitue pas à la signification de ces rites et symboles.
Nous sommes devenus des experts en prédication. Nous sommes en mesure de prêcher sur n’importe quel sujet de la Bible, nous pouvons enseigner sur quoi que ce soit, mais très souvent, il nous manque la puissance et la simplicité de l’Esprit. Aujourd’hui beaucoup de sermons sont des élaborations moralistes, éthiques voire philosophiques, mais ce que l’Eglise a besoin, ce n’est pas ce que Freud, La Fontaine ou La Rochefoucauld enseignent, mais bien ce que la Bible enseigne.
Trop souvent nous oublions ce que Paul affirme lorsqu’il dit en 1 Corinthiens 2:4 – « ma parole et ma prédication ne reposaient pas sur les discours persuasifs de la sagesse, mais sur une démonstration d\’Esprit et de puissance », en d’autres mots, Paul dit ce que fit la puissance de sa prédication n’était pas la forme, mais son contenu.
Il est dit de Thomas D’Aquin qu’il fit une visite de courtoisie au Papa Innocent IV alors même que celui-ci comptait l’énorme somme d’argent qui était en possession de l’Église. Le Pape remarqua : « Voyez-vous, Thomas, l’Église ne peut plus dire : « Je n’ai ni argent ni or. » Ce à quoi Thomas d’Aquin répondit : « C’est bien vrai très Saint Père, en revanche, elle ne peut aussi plus dire maintenant : « Lève-toi et marche. »
Esaïe dit :
« Quand ce peuple s\’approche de moi, Il m\’honore de la bouche et des lèvres; Mais son cœur est éloigné de moi, Et la crainte qu\’il a de moi n\’est qu\’un précepte de tradition humaine » (29:13).
Le formalisme c’est cela. C’est présenter des formes extérieures, mais le cœur n’y est pas. Il est éloigné de Dieu. C’est adorer le Seigneur sans avoir la crainte de Dieu, le respect de Dieu. Le formalisme c’est s’occuper de la forme, mais délaisser ce qui en fait la force.
Souvent, par exemple, la valeur d’une église est mesurée par son art, par sa musique, ou même par le nombre de ses membres. Quid de la teneur de la doctrine. Quid de la centralité de la prédication de la Parole de Dieu. Quid de la communion fraternelle. Quid de l’enseignement. Quid du repas du Seigneur. Or, lorsque l’on lit la Parole de Dieu, jamais, je dis bien, jamais l’apôtre Paul ne complimente une église pour sa musique, pour son art ou pour le nombre de membres qu’elle possède. Ces choses peuvent toutes être bonnes en elles-mêmes, mais elles ne sont pas essentielles pour déterminer si une église est bonne ou pas. En revanche, l’apôtre Paul complimente une église pour son amour pour les frères, pour sa foi, pour son espérance, et Jésus lui-même complimente les églises de l’apocalypse pour leurs persévérance face aux épreuves, leur dédains de la méchanceté, leur souffrance, leur doctrine, le fait qu’elles retiennent le Nom de Jésus, et qu’elle n’ont par renié la foi, le fait qu’elles ont gardé la Parole, et ainsi de suite. En fait, lorsqu’il s’agit de l’église, le Seigneur dit ceci de chaque église de l’apocalypse : Je te connais, je connais tes œuvres, et à celui qui vaincra !
Mais voilà que dans le monde dans lequel nous vivons, la forme est devenue plus importante que le fond. Le rite que sa signification. Le sacrifice que le cœur. Le formalisme en appelle plus à la tradition : ce que nous faisons depuis longtemps, qu’à la révélation de la Parole de Dieu.
Lorsque nos chants, leur rythme, leur genre, leur beauté deviennent plus important que le message qu’ils devraient porter, à savoir l’œuvre accomplie par Jésus sur la Croix, alors nous pouvons dire que quelque chose ne va plus, nous tombons dans un formalisme dangereux. J’oserais même dire que le Saint-Esprit en ressort vexé.
Que cherchons-nous lorsque nous essayons de substituer le fond par la forme ? En général, nous cherchons à perpétuer notre foi par des signes extérieurs en espérant être en mesure de toujours attirer les gens. Or, ce qui attirera les gens vers le Christ, ce ne sont pas les formes extérieures, mais une foi vibrante, une foi véritable, une foi existentielle, une foi qui reflète une relation personnelle avec le Seigneur Jésus Christ.
Les formules doctrinales, quoi que nécessaires à notre foi chrétienne, ne sont pas déterminante pour le salut des gens. Nous devons porter les hommes et les femmes vers une foi personnelle et véritable en Jésus Christ. Lorsque le geôlier demanda à Paul comment être sauvé, l’apôtre lui répond : « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, toi et les tiens. » (Actes 16:31). C’est la seule chose qui soit nécessaire pour le salut : la foi en Jésus Christ. Ce n’est pas une foi intellectuelle, mais une confiance totale en Christ qui pourvoit au salut.
Ainsi, nous ne devons pas tant rechercher les attraits extérieurs de note foi, mais l’Evangile qui est la puissance de Dieu pour le salut de celui qui croit (Romains 1.16). Le mot salut dans ce verset, est le mot grec SOTERIA. D’après les meilleurs outils que nous possédons aujourd’hui, le mot SOTERIA signifie : délivrance, guérison, préservation, salut, sécurité. L’Evangile est la puissance de Dieu qui apporte délivrance, guérison, sécurité, salut et préservation à celui qui croit. L’Evangile n’est pas une idée, un concept, une chose esthétiquement belle, c’est la puissance de Dieu et c’est dans cette puissance que nous devons le connaître.
Ainsi, la doctrine est importante, mais il ne suffit pas de l’énoncer correctement pour qu’elle soit efficace. Nous devons la démontrer dans notre vie de tous les jours. La doctrine doit se manifester dans nos vies par une vie sainte. Ce n’est pas tout de croire la vérité, il faut que cette vérité devienne une partie intégrante de nos vies et qu’elle transforme et libère nos vies. Jésus dit cela à sa manière : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jean 8 :32).
Jean déclare à l’Eglise d’Ephèse que dans son zèle de transmettre la saine doctrine et d’exposer les fausses doctrines, elle avait perdu son premier amour : à savoir un rendez-vous personnel et constant avec le Christ qui se démontre par un amour profond et sincère des autres (Apoc. 2.2-6).
En d’autres mots, notre foi, pour être véritable, doit transformer nos vies. Certains formes de notre foi resteront pour toujours là. Elles ont même été instituées par le Seigneur Jésus lui-même: la prière, la lecture de la bible, le baptême, la Sainte Cène, le mandat de l’Eglise, mais ces formes doivent rester en continuité avec leur signification du passé.
Probablement une des plus belles conversions portées au cinéma est celle de Rodrigo Mendoza, si bien joué par Robert De Niro dans le film “THE MISSION” en 1986. De Niro joue le rôle d’un marchand d’esclave cruel et indifférant à la souffrance des gens qu’il arrache à leurs familles, et les déporte à des milliers de kilomètres de chez eux. Face à la résistance de deux missionnaires, Mendoza attaque la Mission en Amérique du Sud, mais face à l’obstination, Mendoza commence à ressentir des remords profonds pour son comportement et tout le mal qu’il porte autour de lui. Pour cela, il place toute son armure, ses armes et d’autres outils dans un grand filet et les porte sur le dos. C’est lourd, c’est épuisant, c’est son fardeau et Mendoza essaye de se racheter par une sorte de pénitence – encore une fois une forme extérieure – mais le film relate tellement bien ce qui se passe autant dans le cœur de Mendoza que dans celui du Missionnaire qui fait tout pour le dissuader de continuer ainsi : ensemble ils vont traverser des fleuves, la jungle, grimper des montagnes, toujours avec ce fardeau au dos. Cela aux yeux de ces indiens même qu’il exploitait comme de la viande humaine. Alors qu’il tombe à terre sous le poids de ce fardeau, un indien s’approche et le menace avec son couteau, mais il ne fait rien pour se défendre. Finalement, ce n’est pas la gorge qu’il lui tranche, mais la corde à laquelle est attaché le grand filet. L’indien jette le filet dans le fleuve, devant le regard surpris de Mendoza. Il se rend compte que cet indien avait tous les droits de se venger sur lui, de lui ôter la vie, voire de le torturer. Mais non. Il en décida autrement. Mendoza pleure. Il pleure tellement. L’indien lui fait un geste de la main pour le consoler. Il rit. Car probablement il n’a jamais vu un blanc pleurer comme cela. Tous les autres indiens qui observent la scène rient aussi. Le missionnaire, merveilleusement interprété par Jeremy Irons, se jette à ses pieds, le prend dans ses bras, et pleure avec lui. Les pleurs de Mendoza se transforme non plus en pleurs d’un pénitent (la forme), mais en larmes de joies. La joie du salut. La joie du pardon. La joie d’être accepté malgré tout le mal fait. Les rires des indiens ne sont plus des rires moqueurs, mais ceux de gens émerveillés par le changement radical de leur tortionnaire.
La foi en Christ n’est pas une formulation, ce n’est pas un rite, c’est une expérience vivante, personnelle avec un Dieu personnel. Lorsque le philosophe Pascal relate son expérience personnelle avec Jésus Christ, il est clair que son intérêt pour la théologie et pour la Bible ne suffisait pas pour lui apporter ce que seule une vraie conversion peut donner. Ainsi, alors qu’il lisait l’Evangile de Jean au chapitre dix-sept, la présence flamboyante de Jésus apparût dans sa chambre, et sous la conviction du péché il décida de donner sa vie à Jésus et à vivre consacrée pour lui.
Ne substituons pas le fond pour la forme. Vivons une foi vibrante, réelle, passionnée, explosive, extravagante pour le Seigneur. Le formalisme est un ennemi de l’Eglise lorsqu’il prend la place d’une relation personnelle avec le Seigneur ; lorsqu’il se substitue à la signification que chaque forme pourrait avoir. Retournons à la simplicité de l’Evangile, et laissons l’Esprit de Dieu illuminer la Parole et inspirer nos cœurs.
Lorsque le prophète Ezéchiel vit les os séchés et il prophétisa sur ces os, et ceux-ci reprirent vie. Pourquoi ? Non par la lettre qui tue, mais par l’Esprit qui vivifie. C’est comme cela que nous pourrons apporter un témoignage toujours frais, toujours neuf pour les gens autour de nous.